1 Samuel Introduction - CHU

Les livres de Shemouél (Samuel) occupent une place centrale dans la Bible hébraïque. Le livre des Juges, qui les précède immédiatement, avait fait un tableau particulièrement sombre de la situation des Hébreux au lendemain de la conquête: anarchie, idolâtrie, mésaventures tragiques. Dès cette époque, cependant, on perçoit une volonté obscure de redressement. Avec les livres de Samuel, nous arrivons enfin à l’instauration d’un pouvoir central. L’anarchie primitive fait place à un État organisé. En même temps, la vie spirituelle et l’élan religieux parviennent à des sommets qui resteront des points de référence pour Israël et pour l’humanité.

La division de l’ouvrage en deux livres est artificielle et ne se justifie que pour des raisons de commodité. Elle existait pourtant déjà à l’époque des Septante, c’est-à-dire quand la Bible fut traduite en grec.

Comme beaucoup d’autres livres de la Bible, ceux de Samuel n’ont pas été écrits pour raconter l’histoire d’un point de vue littéraire ou scientifique. L’intention prophétique est partout évidente. Pour bien comprendre ces textes et les apprécier à leur juste valeur, il faut entrer dans le jeu des thèmes et des normes qu’ils entendent promouvoir: l’alliance avec IHVH-Adonaï, la solidarité interne du peuple, le droit, l’équité, etc. Tous les récits qu’ils contiennent sont orientés vers une certaine morale de l’Histoire. Un de leurs thèmes majeurs, à ce point de vue, consiste dans les hésitations que fit naître l’institution de la royauté. Déjà le Deutéronome (17,14-20) et le livre les Juges (8,22-23; 9, 7-20) avaient laissé entrevoir ce problème. Il ne fait pas de doute que cette institution fut une source de progrès dans le domaine économique et social; mais elle instaurait en même temps une sorte d’écran entre l’homme et Dieu. De plus, la royauté risquait de dégénérer en tyrannie et en exploitation de l’homme par l’homme. Elle fut souvent à l’origine d’une restauration des cultes idolâtriques. Les hésitations, les mises en garde, les imprécations que nous trouvons à ce sujet dans la Bible ont une valeur exemplaire pour l’ensemble de l’humanité à toutes les époques de son histoire, y compris la nôtre.

Tout porte à croire que l’auteur le plus ancien des livres de Samuel vivait à l’époque de David et faisait partie de l’entourage du roi. Malgré son grand respect pour les faits, son honnêteté intellectuelle est mise à rude épreuve quand il s’agit d’apprécier la personnalité de Shaoul (Saül). Une fois que nous entrons dans l’ère de David, l’admiration sincère de l’auteur pour son héros se heurte à de nouveaux problèmes. L’aventure amoureuse du roi avec Bat-Shèba‘ (Bethsabée) et la révolte de son fils Abshalôm (Absalom) ont donné du fil à retordre à cet historien bien intentionné. Le lecteur moderne prendra acte avec sympathie de l’objectivité de ces récits et du tact avec lequel notre auteur a traité ces sujets scabreux. La morale de l’histoire découle des faits eux-mêmes: l’auteur nous épargne en ce domaine toute considération abstraite.

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