Psaumes Introduction - CHU

Le livre des Psaumes a été ainsi dénommé en raison d’une traduction trop littérale du grec Biblos Psalmôn et du latin Liber Psalmorum. En grec, psalmos désigne un air joué sur l’instrument à cordes appelé psaltérion. Ainsi les versions ont-elles donné au contenu du recueil dont nous parlons un nom évoquant la manière dont ses éléments peuvent être chantés, plutôt que la nature même de ceux-ci. L’hébreu, lui, dit Tehilîm, mot qui dérive de la racine hll, louanger; d’où le titre que nous avons adopté: Louanges, mot splendide, mot rempli d’un contenu émotionnel certain, bien fait pour désigner des poèmes tout orientés vers la louange de IHVH-Adonaï.

La numérotation de ceux-ci n’est pas la même dans la Septante et dans la Vulgate que dans le texte massorétique. En fait, cependant, d’un côté comme de l’autre, on aboutit à un total de cent cinquante psaumes; ce qui constitue un nombre parfait.

Le recueil est divisé en cinq livres (1-41; 42-72; 73-89; 90-106; 107-150). L’exégèse hébraïque offre peut-être la clé de cette répartition en disant que les cinq livres des Tehilîm forment le commentaire symphonique des cinq livres de la Tora de Moshè (Moïse). Les quatre premiers livres se terminent par des doxologies. Le Psaume 150 semble constituer la doxologie du recueil tout entier comme le Psaume 1 en était l’introduction générale.

La plupart des Psaumes ­ hormis trente-quatre d’entre eux, appelés « orphelins » dans la tradition ­ ont des suscriptions qui indiquent les auteurs auxquels ils sont attribués ou précisent les circonstances dans lesquelles ils ont été composés, ou encore la manière dont ils doivent être chantés. Un bon nombre sont attribués à David. C’est le cas de tous les Psaumes du premier livre, qui constitue sans doute la collection la plus ancienne. Font cependant exception les Psaumes 1, 2, 10 et 33. On y trouve, décrites avec passion, avec fureur même, les péripéties de la guerre que le criminel livre au juste.

Le deuxième livre se caractérise, aux yeux de la critique, par la rareté relative de l’emploi du nom de IHVH-Adonaï (45 fois), contre celui d’Elohîms (210 fois). Ici ne sont plus chantées les tragédies de la guerre contre le criminel, mais celles des exils du juste. Comme le cerf brame sur les eaux des ruisseaux, ainsi mon être brame vers toi, Elohîms: tel est le cri qui introduit le Psaume 42. Les souffrances de l’exil, l’affrontement du Juste et d’Elohîms, la joie des noces royales (Psaume 45), l’allégresse plus vive du règne de gloire déjà pressenti; une joie plus constante, en somme, éclate dans chacun de ces poèmes. Le chef-d’œuvre de la série est sans doute le Psaume 68, qui est comme un résumé de l’ensemble.

Les dix-sept poèmes du troisième livre constituent la collection médiane, la plaque tournante du Psautier. Elle est massive, statique. C’est une implacable méditation du passé dans l’attente des fins dernières. Le long poème consacré à la sortie de Misraîm, à la traversée et aux tentations du désert, aux révoltes d’Israël, à l’élection de Iehouda et de David (Psaume 78), occupe exactement, la Massora le souligne, le milieu du recueil.

Avec le quatrième livre, le cap des douleurs semble franchi. Nous pénétrons dans la joie sans mélange des puissances de IHVH-Adonaï. Sa gloire, sa sublimité, son règne glorieux, la justice de son jugement, la délivrance universelle, la joie de toute la terre, tels sont les thèmes principaux de l’admirable série 90-106, traditionnellement interprétée dans les perspectives de l’eschatologie biblique.

Le cinquième livre représente les dernières étapes d’une ascension. Ses trois premiers Psaumes (107-109) reprennent le thème de la délivrance des justes et de la condamnation des coupables, mais sur un ton d’allégresse auquel se mêlent des accents parfois terribles. Le Grand Hallel (113-118) introduit aux litanies du Psaume 119, divisé en vingt-deux strophes de huit vers dont chacun commence par la même lettre de l’alphabet. Suit l’étincelante collection des Shir ha-ma‘alot, les quinze poèmes des degrés (120-134). Le crescendo se poursuit dans les Psaumes suivants, qui chantent les grandeurs de IHVH-Adonaï. L’hymne de la glorification de l’homme en IHVH-Adonaï s’achève sur un cri de haine implacable contre les haineux. Il permet une nouvelle rupture des rythmes, d’ultimes appels aux grâces et aux justices de IHVH-Adonaï Elohîms, appels qui annoncent les tout-puissants accords du final (145-150).

Peu de problèmes divisent autant les biblistes que celui de la chronologie du Psautier. Pendant des siècles, juifs et chrétiens ont attribué les Psaumes à David et aux autres auteurs mentionnés dans les suscriptions. La critique moderne a détruit ces tranquilles assurances. Au XIXe siècle, on a cru que les Psaumes ne remontaient pas plus haut que l’époque hasmonéenne. Cette position extrême est aujourd’hui abandonnée. Mais le problème de la datation de chaque psaume ou série de psaumes demeure sans réponse vraiment convaincante.

En fait, le Psautier, bien plus qu’un livre écrit dans un très lointain passé, demeure un être vivant, qui parle et vous parle, qui souffre, gémit et meurt, pour ressusciter et chanter en dehors du temps, dans la pérénnité du présent de l’homme, et qui vous prend, vous emporte, du commencement à la fin. Oui, ce volume recèle un mystère, pour que les âges ne cessent de revenir à ce chant, de se purifier à cette source, d’interroger chaque verset, chaque mot de l’antique prière, comme si ses rythmes battaient la pulsation du monde.

Les Psaumes ont été traduits dans toutes les langues et dans une multitude de dialectes. Ils ont été paraphrasés en vers et en prose, glosés, commentés, illustrés, imités. Partout, les plus grands écrivains, de Marot à Claudel, de Sternhold à Carlyle ou Milosz, ont été littéralement fascinés par eux.

Et voici bientôt deux millénaires que couvents et ghettos se rencontrent mystérieusement, en une garde d’amour, pour psalmodier, ici en latin, là en hébreu, les hymnes inventées par les chantres d’Israël.

Livre premier (1 à 41)
Livre deuxième (42 à 72)
Livre troisième (73 à 89)
Livre quatrième (90 à 106)
Livre cinquième (107 à 150)

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