Iehèzqèl (Ézéchiel), dont le nom signifie « Él fortifie », était fils d’un prêtre de Jérusalem, Bouzi. On croit généralement qu’il fut emmené à Babylone avec d’autres Hébreux lors de la première déportation, en 597. Certains estiment, cependant, qu’il serait resté à Jérusalem jusqu’en 587; mais cette opinion se heurte à diverses objections tirées du texte lui-même. Il a sa première vision sur une rive du canal Kebar, à Tel Abib, en akkadien til-abubi, la « colline du dieu des tempêtes ». Nous ignorons tout de sa vie privée, sinon qu’à la différence peut-être de son contemporain Jérémie, il était marié.
Ézéchiel est d’abord un prophète de l’exil, qui garde le souvenir de la terre d’Israël et le fervent espoir du retour. Jamais il ne rompt le lien intime qui l’attache à Sion. Plus précisément, il est l’homme de IHVH-Adonaï: qu’il réside à Jérusalem ou en Babylonie, son Dieu est IHVH-Adonaï, l’Elohîms de ses pères. C’est celui-ci qui l’inspire et est la source unique de sa pensée et de son espoir. Il voue à ce Dieu, et à cause de lui à son peuple, à sa ville et à son Temple, un zèle inextinguible, nourri d’une ardeur qui le pousse à des actions et à des discours que ses contemporains trouvent insensés.
Du début à la fin de sa carrière prophétique, l’homme est obsédé par sa première vision: celle du char qui a emporté IHVH-Adonaï loin de Jérusalem. C’est ce vide, ce manque, qui inspire toute sa vie, sa pensée et son action. Il n’aura de cesse que cet abîme ne soit comblé. IHVH-Adonaï doit revenir dans sa ville, dans son sanctuaire. Le livre se termine sur la vision de ce retour (ch. 43) et sur une minutieuse description du Temple reconstruit et rénové. De ce géant de l’esprit, la démesure est évidente, et l’intensité de ses images contribue encore à le situer hors du commun. Avec plus de force néanmoins qu’Isaïe et que Jérémie, il manie avec un vrai génie l’allégorie. Il faudra attendre Jésus pour rencontrer une utilisation aussi puissante de la parabole. Sa langue, nourrie au silence d’une vraie contemplation, devient un chant qui transcende toute frontière entre la prose et la poésie. On retrouve d’ailleurs dans le Nouveau Testament plusieurs idées et images directement inspirées par ce livre: l’œuvre d’Ézéchiel, centrale dans la tradition et l’histoire d’Israël, a exercé une influence durable sur le christianisme, et par lui sur la pensée du monde occidental.