1 Samuel Introduction - AMI

Les deux premiers Livres des Rois sont ainsi dénommés à la suite de la version grecque des Septante, par analogie avec les IIIe et IVe Livres : les uns et les autres racontent, en effet, l’histoire des rois israélites. Mais il s’agit de deux ouvrages nettement différenciés par le style, le vocabulaire et les préoccupations doctrinales. Les Ier et IIe Livres forment une œuvre autonome, que la Bible hébraïque appelle Livres de Samuel : ce dernier n’en est pas l’auteur, mais son rôle de premier plan dans l’institution de la royauté explique que l’on ait désigné l’ouvrage par son nom.
Il raconte un peu plus d’un siècle d’histoire, de la naissance de Samuel (XIe siècle av. J.-C.) à la mort de David exclusivement (vers 971) ; mais c’est une période capitale qu’illustrent trois personnages aux destinées solidaires : 1° Samuel, libérateur et prophète, doit, dans sa vieillesse, renoncer à son rôle politique, sous la pression du peuple et sur l’ordre de Dieu ; il confère à Saül l’onction royale (I – XII). 2° Les règne de Saül (XIII – XXXI) commence glorieusement, mais deux fautes graves provoquent la réprobation divine. Samuel, qui garde tout son prestige religieux, se sépare de Saül et sacre comme nouveau roi le jeune David, dont la popularité excite bientôt la jalousie persécutrice de Saül. Le sentiment de sa réprobation, la conscience d’une opposition qui se généralise, de graves fautes politiques (comme le meurtre des prêtres de Nobé) et la guerre philistine amènent une issue désastreuse : défaite de Gelboé et mort de Saül. 3° Le IIe Livre des Rois racontera comment David, roi légitime depuis son sacre par Samuel, affermit le pouvoir échappé à Saül, étend et organise son royaume, et comment la monarchie devient héréditaire dans sa famille.
Cet ouvrage qui fait suite au Livre des Juges (au point que ses chapitres I – VII et XII semblent bien en avoir été détachés) est, comme lui, le résultat d’une compilation. L’auteur a utilisé, et parfois mentionné plusieurs documents : l’Histoire de Samuel, les Annales de David, le Livre du Juste, etc. ; mais, de l’avis commun, ce sont des documents très anciens, de peu postérieurs aux événements : ils en ont gardé toute la vie, les détails souvent pittoresques, ils dépeignent au vif le caractère et les intrigues des personnages. Comme celui des Juges, le Livre de Samuel (Ier et IIe Livres des Rois) fut composé après la chute de Samarie (722), quand on put réunir les documents littéraires des deux royaumes, et plus précisément sans doute à la grande époque littéraire du VIIe siècle.
Alors, en effet, on tend à exalter, en opposition à la triste fin de la monarchie samaritaine, la stabilité de la dynastie davidique et la gloire de Jérusalem – c’est bien l’enseignement que propose l’auteur du présent ouvrage, où tout converge vers David : Samuel est l’instrument divin pour instaurer la royauté ; Saül, infidèle aux ordres de Dieu, est rejeté par lui ; David, malgré sa faute, demeure fidèle et pieux, et mérite par là pour sa dynastie des promesses de pérennité (II Rois VII). Désormais, en effet, on considère la royauté comme une institution sacrée, devant réaliser le plan divin sur Israël, et assurer la fidélité du peuple élu ; la théologie de l’Alliance, selon l’esprit du Deutéronome et des Prophètes, est mise ici en un relief aussi net que dans le Livre des Juges : il y a une étroite dépendance entre la conduite d’Israël envers Dieu et son développement ; mais désormais le roi davidique apparaît comme le guide responsable de son peuple et l’instrument des promesses divines à son égard.

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