Nombres Introduction - AMI

Le titre adopté pour ce livre, à la suite de la version grecque, vient de ce qu’il contient trois dénombrements, trois recensements du peuple ou des Lévites. C’est en fait l’histoire d’Israël, du Sinaï au Jourdain ; mais le récit est entremêlé des prescriptions légales et de documents divers, si bien qu’on n’y trouve pas la même rigueur de composition que dans les trois premiers livres de Moïse. L’unité de l’ouvrage résulte cependant du lien chronologique et géographique qui en relie les divers éléments. On peut y distinguer trois grandes parties :
1° La fin du séjour au Sinaï (I, 1 – X, 10) marquée par le recensement du peuple
les dispositions prévues pour la marche, les campements, le transport du matériel sacré
enfin diverses prescriptions et la célébration de la Pâque.
2° Les pérégrinations au désert (X, 11 – XXII, 1), un voyage aux multiples péripéties, grosses de menaces, conduit les Hébreux à Cadès, l’actuelle Aïn-Qedeis ; le rapport pessimiste des espions envoyés en Chanaan décourage Israël, qui se révèle encore inapte à la conquête de la terre promise. Condamné à demeurer pendant une génération dans le désert, le peuple échoue à la suite d’une tentative désespérée dans le Négeb palestinien : son unité est encore bien précaire (X – XIV).
Ce sont alors les trente-huit ans au désert, triste période sur laquelle le livre saint garde un silence intentionnel. Cependant les Hébreux, dispersés par tribus ou clans dans la région de Cadès, y mènent la vie des semi-nomades. En ces débuts de sédentarisation, des cas concrets se présentent, dont on demande la solution à Moïse ; ce dernier s’inspire à l’occasion des coutumes et institutions madianites plus avancées en matière sociale ; la vie religieuse se développe elle aussi, et, à la suite de contestations pour le service de l’autel, Moïse affirme la supériorité du sacerdoce aaronide. Ainsi, d’une masse d’abord informe, les Hébreux deviennent peu à peu un peuple homogène (XV – XIX).
Avec la nouvelle génération, Moïse reprend le projet de conquête. Une première tentative de pénétration directe échoue ; il faut contourner les jeunes royaumes d’Édom et de Moab ; le roi amorrhéen Séhon, refusant le passage, est vaincu au nord de l’Arnon, et son royaume conquis depuis ce fleuve jusqu’au Jaboc (XX, 1 – XXII, 1).
3° L’installation en Transjordane (XXII, 2 – XXXVI), inquiète Moabites et Madianites. Pour conjurer le péril, le roi de Moab recourt au devin Balaam, qui, sous la pression divine, formule à l’adresse d’Israël des bénédictions inattendues. Les femmes madianites séduisant et entraînant certains Hébreux au culte des idoles, leurs tribus sont vaincues et dépouillées. La partie conquise de la Transjordane est répartie entre les fils de Gad et de Ruben, et une partie des clans manassites : ils devront toutefois aider leurs frères à s’emparer de Chanaan.
Le récit de ces événements est plusieurs fois coupé par un nouveau recensement général du peuple, par des ordonnances diverses et plusieurs autres documents.
Tout cet ensemble, assez disparate, n’en constitue pas moins un document de premier ordre pour l’histoire des Hébreux nomades. Il s’en dégage nettement le rôle de tout premier plan joué par Moïse comme chef religieux, politique, social, voir militaire, et comme législateur ; son portrait moral s’y précise, avec sa foi, son énergie et son intelligence des choses et des personnes, au milieu de luttes incessantes, parmi l’insubordination et l’ingratitude. Mais plus encore, une grande leçon résulte des faits et des prescriptions : Dieu comble les hébreux de bienfaits et les aide par des miracles ; aussi doivent-ils lui être fidèles et pratiquer la Loi.

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