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Douze chapitres, trois cent cinquante-sept versets composent les deux parties de cet écrit qui rapporte les aventures et les visions d’un Judéen, Daniél (Daniel) dont le nom signifie « Él m’a jugé ».

Le « premier » Daniel (ch. 1 à 6) est fait de six récits qui mettent en scène quatre jeunes hommes de Juda emmenés en exil et vivant à la cour de Neboukhadrèsar (Nabuchodonosor). Parmi eux, Daniel. Comme jadis Joseph en Égypte, il excelle à interpréter les rêves: celui de la statue faite de diverses matières, celui du grand arbre. Il sait aussi déchiffrer une écriture mystérieuse (ch. 5). À quoi viennent se joindre des récits de miracles: les trois jeunes gens jetés dans une fournaise et y restant en vie, Daniel lui-même donné en pâture aux lions et respecté par eux. Ces courtes histoires véhiculent une théologie, celle du peuple de l’exil, qui rêve de son Elohîms et dont le triomphe sur les empires de ce monde lui apparaît comme imminent.

Dans le « deuxième » Daniel (ch. 7 à 12), l’auteur s’exprime à la première personne. Il décrit ses visions ­ des visions qui relèvent du genre apocalyptique ­ : les quatre bêtes, le bélier et le bouc, les soixante-dix semaines, la délivrance finale. Nous ne sommes plus à Babylone, mais en terre d’Israël. Il s’agit, non plus directement de Daniel, encore moins de ses compagnons, mais des fins dernières de l’histoire d’Israël. Les empires s’écrouleront, la persécution cessera, à l’heure miraculeuse toujours promise, toujours attendue, du jour de IHVH-Adonaï.

Dans la première comme dans la deuxième partie, sous des images et des symboles souvent énigmatiques, mais de plus en plus transparents à mesure que s’éloigne le temps de Nabuchodonosor, l’auteur vise à proposer une théologie de l’histoire. Il ne s’embarrasse guère de précisions qui ne cadreraient pas avec sa vision des choses. S’il entend rapporter des faits réels, il ne recule pas devant des anachronismes. Il s’attache surtout à la signification mystique et théologique des symboles. C’est ainsi qu’il désigne sous l’expression « abomination de la désolation » (9,27; 12,31) l’autel dédié à Zeus Olympien qui avait été érigé dans le Temple, le 7 décembre 167. Ainsi le livre de Daniel est-il une illustration de l’histoire d’Israël, en état de danger permanent face aux empires qui préparent ou consomment sa ruine. Pour l’auteur, cependant, il est certain que la justice IHVH-Adonaï finira par s’imposer: les justes triompheront, le mal disparaîtra, les coupables seront punis.

Mais la justice de IHVH-Adonaï ne peut être que totale. Elle s’exercera donc rétroactivement sur tout le passé. Pour la première fois, la résurrection des morts est annoncée ouvertement: Des multitudes d’endormis dans la poussière de la glèbe se réveilleront, les uns pour recevoir la sanction de leur justice, la vie en pérennité, les autres celle de leurs crimes, l’opprobre en pérennité (12,2). La vision, pour fantastique qu’elle soit, se situe dans la logique la plus profonde du message biblique.

Est-ce folie que d’annoncer la résurrection des morts ? Peut-être, mais pas plus que de prédire des ciels nouveaux et une terre nouvelle, ou bien le grand jour où la lutte entre elles des nations, des classes et des espèces se résoudra dans l’ultime victoire de la lumière sur la nuit, de la paix sur la guerre.

La langue originale du livre de Daniel est l’hébreu et, en partie, l’araméen (2,4 b à 7,28). Cette dualité reflète la situation d’Israël après l’exil. Le peuple a alors largement adopté la langue de ses vainqueurs. Les versions grecques ont ajouté à l’ouvrage certains épisodes qui ne nous sont connus que par elles. On trouvera ces additions page 1856.


Introduction de la André Chouraqui

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